2014 marquait le soixante-dixième anniversaire du droit de vote des femmes en France. Le bilan de l’insertion des femmes dans les sphères professionnelle et politique n’a pas encore atteint le seuil de parité espéré. A chaque jour sa polémique sexiste. Le collectif Chiennes de Garde, acteur historique de la troisième vague féministe, vient d’élire Franck Keller, conseiller municipal de Neuilly-sur-Seine, “macho de l’année”[1]. Cette année, ils étaient nombreux à être prétendants au titre !
 

L’enquête de Mazars[2] “Bienvenue sur la planète Femmes !” établissait le constat selon lequel les femmes issues de la Génération Y – notre génération – tendent à redéfinir le féminisme comme un féminisme “inclusif”. Redéfinir, non pas pour dénaturer le combat des générations précédentes qui ont obtenu les droits les plus fondamentaux à l’instar du droit de vote, de la liberté de disposer de son corps ou plus récemment des lois dites de parité, mais pour mettre fin à la plus grande discrimination: le sexisme. Ce sexisme continue de freiner les femmes dans leur accès aux postes de pouvoir dans les sphères privé et publique et dans leur accès à l’éducation. Je connais certaines femmes engagées pour la diversité, qui refusent d’utiliser le qualificatif féministe, parce qu’il refléterait uniquement le combat pour les droits fondamentaux. Certains hommes et femmes affirment être pour “l’égalité réelle entre les femmes et les hommes dans toutes les sphères de la société” mais refusent le qualificatif de féministe, connoté négativement par une partie de la société (Women Against Feminism[3]), comme un combat anti-hommes avant d’être un combat pour la diversité… Comme si les femmes devaient entrer dans un conflit, pour prendre aux hommes – ou “voler” – ce qu’elles méritent pourtant amplement. Nous dénoncions ce préjugé dans un article décalé.[4] Certains vont même jusqu’à instrumentaliser le féminisme en l’apparentant à une guerre des sexes, pour décrédibiliser le mouvement et continuer d’asseoir la surreprésentation masculine.

 

Hélène Kloeckner, référente de l’égalité femmes-hommes à Sciences Po

A Sciences Po, Frédéric Mion a lancé un bureau pour l’égalité femmes-hommes en mai 2014, avec pour référent Hélène Kloeckner. Le bureau a notamment organisé une cellule de veille sur le harcèlement sexuel à Sciences Po.

Si à Sciences Po, nous avons 60% d’étudiantes, leur représentativité dans les associations est relative. Certaines associations excluent les étudiantes des responsabilités associatives, alors que d’autres promeuvent les étudiantes ‘naturellement’ ou à l’aide de la parité. Quant au sexisme à Sciences Po, il existe bel et bien. Qui n’a pas entendu ou lu une phrase sexiste à la suite de la victoire d’Irina Kratz au Prix Philippe Séguin?

 

Le débat sur la parité dans les associations à Sciences Po doit être posé. Tout comme il l’a été dans la société française dans les années 1990. Les critiques relevant du manque de mérite ou de compétences des étudiantes pour leur accès aux responsabilités associatives (comme je l’ai trop souvent entendu à Sciences Po) doivent cesser. Tout d’abord parce que les étudiantes ont toutes les compétences pour être nommées ou élues au sein des bureaux. Elles sont toutes aussi investies et entreprenantes que les étudiants. Parfois elles demandent à être promues, parfois non. Il faut les encourager à le faire et le biais de la parité peut aider les étudiantes à avoir davantage de volonté.

 

La diversité est avec l’écologie et la paix, l’un des enjeux mondiaux du 21ème siècle : l’accès à l’éducation pour toutes les jeunes filles, une meilleure égalité sociale entre les femmes et les hommes, une meilleure représentation des femmes dans les postes à responsabilité dans les sphères professionnelle et politique.

Sheryl Sandberg à Sciences Po (c) @Vesnalyze Twitter

Le féminisme a une visée universelle. Il n’a ni couleur ni religion. La génération Y se croit épargnée des discriminations liées au genre. Elle pense que la société est prête et que ce sera plus évident qu’auparavant d’accéder aux postes de pouvoir. C’est face à cette inertie de la jeunesse, du harcèlement de rue et du sexisme ordinaire persistants, que nous nous engageons pour un féminisme citoyen, inclusif, tolérant et innovant.

La quatrième vague de féminisme commence à s’installer avec des initiatives comme celle deMalala, le “Malala Fund”[5], Prix Nobel de la Paix, en faveur de l’éducation des jeunes filles, le programme HeForShe[6] portée par l’Ambassadrice de bonne volonté Emma Watson ou encore l’association Lean In[7] de Sheryl Sandberg, numéro 2 de Facebook, pour l’égalité des femmes et des hommes dans la vie professionnelle et familiale. L’action féministe efficace doit d’être ciblée, c’est pourquoi Politiqu’elles s’engage au quotidien pour la promotion des étudiantes à Sciences Po.

Fatima EL OUASDI, Présidente de Politiqu’elles

[1] L’UMP Franck Keller élu macho de l’année http://www.bfmtv.com/politique/l-ump-franck-keller-elu-macho-de-l-annee-867615.html

[2] Etude de Mazars « Bienvenue sur la planète femmes » http://www.mazars.fr/Accueil/News/Publications/Enquetes-et-Etudes/Bienvenue-sur-la-planete-Femmes

[3] Tumblr Women Against Feminism http://womenagainstfeminism.tumblr.com/

[4] Sortir avec une étudiante de Sciences Po : Est-ce une bonne idée ? http://politiquelles.org/2014/06/28/sortir-etudiante-sciences-po-ce-bonne-idee/